Vue normale

Reçu avant avant-hierInnovation Pédagogique

Four more years pour la chaire UNesco REL-IA à Nantes

Non. Ne vous méprenez pas. Il ne s'agit pas d'un article réclamant la réélection en 2028 de vous savez qui. Il s'agit juste de vous indiquer que la Chaire Unesco RELIA vient de se voir reconduite par l'UNESCO pour 4 nouvelles années.

Comment fonctionnent les chaires UNESCO ?

Il y a aujourd'hui plus de 1000 chaires dans le monde. Pour créer une chaire UNESCO une Université présente un projet à sa Commission Nationale pour L'UNESCO qui décide de la présenter ou pas. Sachant que seuls deux nouveaux projets peuvent être présentés par un pays chaque année. Pour les pays riches en Chaires -c'est bien entendu le cas de la France- la compétition est rude. S'ensuit un examen à l'UNESCO de la candidature, examen qui peut prendre plusieurs mois.

Pour un renouvellement, c'est un peu plus simple. Le projet est à accompagner d'un bilan et est examiné directement par UNITWIN, le département de l'UNESCO en charge des Chaires et des Réseaux.

Et pour RELIA ?

L'examen de la Chaire a été très rapide et nous avons donc été renouvelés. Nous sommes fiers de notre bilan et notre projet était dans la continuité du projet déposé en 2021, renforcé par les lignes d'action développées depuis.

Mais là où en 2021 nous avions dû attendre le mois d'octobre pour être notifiés de la reconduction, cette fois ci c'est en avril que nous avons eu la bonne nouvelle.

Un positionnement devenu central

La différence est que le choix de 2021 de marier éducation ouverte et intelligence artificielle a été examiné à la loupe en 2021 : c'était assez révolutionnaire ! Penser que l'IA pouvait contribuer à l'éducation ouverte et qu'inversement l'éducation ouverte était une approche intéressante pour donner des réponses aux questionnements de l'IA… ce n'était pas du tout standard.

Aujourd'hui, et nous pouvons penser avoir contribué à ce que ce soit le cas, cette approche est standard. Les objets que nous avons créé ou contribué à créer ces dernières années qui essaient d'explorer ces interactions sont aujourd'hui adoptés par d'autres.

Le message de l'UNESCO

L'UNESCO nous enjoint de continuer notre travail sur l'IA et sur l'éducation ouverte. Et mentionne dans son courrier notre communication et en particulier ce blog :

L'UNESCO félicite la Chaire pour son site web, régulièrement mis à jour et reflétant clairement ses objectifs et activités, ainsi que pour l'utilisation efficace des réseaux sociaux, qui contribuent à accroître sa visibilité. Il est essentiel de maintenir cette dynamique, en mettant en valeur les synergies avec les initiatives pertinentes de l'UNESCO.

Licence
Licence Creative Commons

Sauf indication contraire, l'ensemble des contenus de ce site https://chaireunescorelia.univ-nantes.fr/ est mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International.

Reçu hier — 8 mai 2025Innovation Pédagogique

Entre attaques américaines et illusion française, les sciences humaines et sociales en danger

Des coupes budgétaires aux discours politiques, les sciences humaines et sociales sont de plus en plus marginalisées. Derrière les discours de solidarité académique se rejoue une hiérarchie des disciplines qui fragilise la pensée libre et la diversité intellectuelle.


Depuis son retour au pouvoir, Donald Trump a transformé le gel des financements fédéraux aux universités en instrument politique. Sous couvert de « lutte contre l'antisémitisme », l'administration républicaine a suspendu des subventions de plusieurs milliards de dollars, touchant des institutions phares comme Harvard, Columbia, Cornell ou Northwestern.


Du lundi au vendredi + le dimanche, recevez gratuitement les analyses et décryptages de nos experts pour un autre regard sur l'actualité. Abonnez-vous dès aujourd'hui !


Face à ce choc budgétaire, certaines universités intentent des recours juridiques, tandis que d'autres s'inclinent, préférant préserver leurs budgets en se pliant aux injonctions politiques trumpistes. Une atmosphère de censure s'installe, dénoncée notamment par le collectif Stand Up for Science, qui alerte sur un climat de peur et de surveillance généralisée.

Derrière cette rhétorique, c'est l'université elle-même, en tant qu'espace de pensée libre, qui est visée. Et ce sont les disciplines critiques qui se retrouvent en première ligne. Les premières frappées par les coupes budgétaires sont les sciences humaines et sociales : histoire des minorités, études de genre, sociologies LGBTQIA+, justice environnementale. Les discours officiels prétendent lutter contre « l'idéologie du genre » ou le « communautarisme », mais la cible véritable est évidente : il s'agit d'étouffer les recherches qui interrogent l'ordre établi.

Aujourd'hui, des projets portant sur la santé reproductive, les droits LGBTQIA+, ou les politiques d'inclusion sont suspendus pour avoir simplement utilisé des termes comme « women », « trans » ou « diversity ». La mise sous tutelle de plusieurs départements d'études identitaires à Columbia University illustre de manière flagrante cette offensive.

Les programmes Diversité en première ligne

Ce sont ainsi les chercheurs et chercheuses issus des groupes historiquement marginalisés – femmes, personnes racisées, minorités sexuelles, « first-generation » – qui se retrouvent en première ligne de cette purge intellectuelle. Leur engagement dans des champs critiques les rend vulnérables à une offensive qui cible moins les figures médiatiques que les précaires de l'université : maîtres de conférences débutants, contractuels, vacataires, doctorants, postdoctorants. Les politiques d'austérité s'attaquent aussi aux programmes DEI (Diversity, Equity and Inclusion), souvent les seuls leviers permettant de compenser un système d'enseignement supérieur encore profondément inégalitaire. Le rêve d'un campus américain ouvert à la diversité se fissure.

Face à ce paysage, nombre de chercheurs tentent de se reconvertir dans le privé. D'autres envisagent l'exil. Un sondage publié par Nature indique que près de 75 % d'entre eux envisagent de quitter les États-Unis à la suite de ces coupes. Mais ces deux fuites sont des privilèges réservés à celles et ceux qui disposent de ressources : des diplômes reconnus, des réseaux internationaux, un capital économique et social. Ce ne sont donc pas les plus menacés qui partent, mais les mieux armés.

Ce moment de crise, brutal et idéologique, dépasse donc le cadre américain car il dévoile une faille plus large : à qui appartient la recherche, et pour qui produit-on du savoir ? La chasse aux sorcières engagée aux États-Unis révèle les vulnérabilités d'un système universitaire global qui, tout en vantant sa liberté, reproduit des inégalités structurelles et des hiérarchies de savoirs. L'Amérique ne fait ici que tendre un miroir au reste du monde.

L'illusion d'un asile scientifique

La réponse française à la situation américaine fut rapide. Dès mars, Aix-Marseille Université (AMU) annonçait le lancement du programme Safe Place for Science, une initiative destinée à accueillir des chercheurs menacés par les coupes budgétaires de l'administration Trump. Présentée comme un geste de solidarité académique, l'initiative promettait des « bourses de secours » et un « asile scientifique » à celles et ceux dont les travaux devenaient indésirables aux États-Unis. Dans la foulée, d'autres prises de position ont suivi : le mouvement Stand for Science s'est manifesté dans plusieurs villes françaises, Emmanuel Macron a lancé le programme « Choose France for Science », et François Hollande a appelé à créer un véritable statut de réfugié scientifique. L'Union européenne, de son côté, envisage de coordonner un effort d'asile scientifique à l'échelle continentale. Le projet Choose Europe for Science souffre d'un cruel manque de moyens : Ursula von der Leyen promet 500 millions d'euros pour l'ensemble du continent, quand Donald Trump suspend, à lui seul, 3 milliards de dollars destinés à une seule université – Harvard.

Mais cette mobilisation spectaculaire masque mal les fissures profondes de l'université française elle-même. Car en France aussi, les sciences humaines et sociales sont fragilisées : sous-financées, peu institutionnalisées, souvent marginalisées dans les politiques de recherche. Le paradoxe est frappant : chaque année, des dizaines de chercheurs français quittent l'Hexagone faute de postes ou de moyens pour poursuivre leurs travaux.

Peut-on donc sérieusement prétendre accueillir des chercheurs exilés quand on échoue à retenir les siens ? Peut-on se présenter comme terre d'accueil quand les conditions de travail des universités sont marquées par la précarité, des salaires dégradés, des infrastructures vétustes, et une défiance croissante envers les disciplines critiques – ces champs de recherche qui analysent les rapports de pouvoir, les inégalités sociales, raciales et de genre, les dominations économiques ou coloniales, et qui interrogent en profondeur les fondements mêmes de nos sociétés ?

Cette contradiction structurelle se retrouve donc dans les chiffres. AMU a reçu plus de 300 candidatures au programme Safe Place for Science, mais seulement un tiers concernait les sciences humaines et sociales. Le soutien de « Choose France for Science » n'essaie même pas de sauver les apparences : il se concentre exclusivement sur les champs perçus comme neutres – numérique, physique, médecine, intelligence artificielle.

Si Aix-Marseille affirme attirer une diversité de profils, la réalité est plus étroite : la majorité des candidatures proviennent des grandes universités américaines. Le programme lancé par le gouvernement français, structuré autour de dix chantiers de recherche prédéfinis, semble reconduire des logiques de sélection excluantes : les chercheurs et chercheuses aux parcours plus marginaux ou aux engagements politiques sensibles, déjà fragilisés, y restent largement invisibilisés.

Ce choix révèle l'inconfort profond du système universitaire français face à certaines formes de savoirs. Depuis plusieurs années, figures politiques, universitaires et médiatiques se sont employées à populariser les attaques contre le « wokisme », accusant les sciences sociales critiques de verser dans le militantisme idéologique. Ces campagnes ont installé un climat de suspicion qui freine l'institutionnalisation de nombreuses disciplines. En France, il n'existe toujours pas de départements dédiés aux études de genre, aux études des minorités ou aux études postcoloniales.

Les masters et les thèses dans ces champs restent extrêmement rares, faute de spécialistes pour les encadrer, faute aussi de débouchés professionnels pour les justifier. Cette marginalisation se traduit désormais dans les politiques d'accueil : les humanités critiques sont reléguées à l'arrière-plan, souvent purement et simplement oubliées. Comment accueillir des chercheurs étrangers dans ces disciplines, lorsque les structures d'enseignement et les collègues pour les accueillir n'existent tout simplement pas ?

Ce que révèle donc cette solidarité sélective, c'est la reproduction d'une hiérarchie disciplinaire. À vouloir accueillir sans remettre en question ces propres mécanismes d'exclusion, l'université française finit par reconduire, sous une autre forme, les inégalités qu'elle prétend dénoncer. Ce n'est donc pas seulement l'université américaine qui vacille : c'est l'idée même d'un espace universitaire mondial fondé sur la libre production du savoir, ouvert à la critique et à la diversité intellectuelle, qui est aujourd'hui en crise, des deux côtés de l'Atlantique.

Vers une solidarité académique à refonder

Si la solidarité avec les chercheurs en danger doit avoir un sens, elle doit commencer par des mesures concrètes et immédiates. Il faut rompre avec la logique des dispositifs d'urgence et construire des réseaux pérennes de sanctuaires académiques, capables d'offrir des financements stables, et des lieux d'ancrage intellectuel. Des initiatives comme le programme PAUSE en France ou le Scholar Rescue Fund aux États-Unis en offrent déjà un aperçu, mais leur portée reste encore trop limitée.

Ce que la situation exige aujourd'hui, ce sont des coalitions élargies : non seulement des universités isolées, mais aussi des collectivités territoriales, des fondations citoyennes, et des centres de recherche indépendants, travaillant ensemble pour soutenir durablement les savoirs critiques. Car l'accueil ne saurait se limiter aux disciplines perçues comme neutres ; il doit au contraire prioriser celles sont précisément rendues vulnérables par la crise actuelle.

Mais une telle hospitalité ne suffira pas sans une transformation structurelle de l'université. La solidarité doit devenir un principe organisateur, et non un geste périphérique : ouvrir des départements d'études minoritaires, sanctuariser des financements pour les humanités critiques, reconnaître la valeur des savoirs issus des luttes sociales. Ces savoirs ne sont pas secondaires : ils sont devenus essentiels, y compris pour la recherche « dure ».

Les études critiques ont révélé les biais de genre en biomédecine, enrichi l'épidémiologie des inégalités de santé, et interrogé les biais coloniaux dans l'intelligence artificielle, par exemple. Tant que ces disciplines resteront marginalisées, toute promesse d'asile scientifique restera illusoire : sans elles, l'université produit des savoirs partiels, aveugles aux sociétés qu'elle prétend éclairer.

Enfin, repenser la solidarité académique aujourd'hui, c'est reconnaître que la survie de l'université n'est plus compatible avec les logiques d'excellence, de conformité, et de compétition mondialisée. L'université ne sera pas sauvée par ses classements ni par ses slogans sur l'innovation ; elle le sera en redevenant un espace vivant de dissidence intellectuelle, de conflictualité assumée, et d'invention collective.

Penser librement, aujourd'hui, n'est pas un luxe mais une condition vitale pour des sociétés démocratiques en mutation. Si l'université veut continuer à jouer ce rôle essentiel, elle devra s'ouvrir pleinement aux savoirs critiques, et faire de la pluralité intellectuelle non pas une menace, mais un moteur de son renouveau.

The Conversation

Tristan Cabello ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

Histoire des communs, vidéo pédagogique sur Interpôle

8 mai 2025 à 09:00

Histoire des communs

Description de la ressource Une présentation de l'histoire des communs inspirée des travaux de Lionel Maurel sous forme d'une vidéo de 17'

Type de ressource Notion, concept
Thématique de la ressource
  • Communs et partage de connaissance
Auteur.trice(s) de la ressource Manuel Ibanez
Licence d'utilisation la ressource CC 0
Contributeur.trice.s connaissant cette ressource
Cette fiche est elle un brouillon ?
  • Non

Atelier Epop& Nantes - Dessiner les possibles, atelier tableau de vision avec Flora Clodic-Tanguy

8 mai 2025 à 09:02

Atelier Epop& Nantes - Dessiner les possibles, atelier tableau de vision avec Flora Clodic-Tanguy

Description Écouter ce qui nous inspire et le mettre en image

Le tableau de vision — ou "vision board" — est un outil créatif qui permet de mettre en image ses idées, ses projets, ses envies du moment. On y colle des images, des mots, des couleurs, des textures… Pas de plan rigide à suivre, plutôt un espace pour se laisser surprendre, poser ses intuitions, faire émerger ce qui est là, pour un projet créatif, personnel ou professionnel.

Nous ouvrirons l'atelier par un bref échange tous ensemble, autour de vos intentions, questions et souhaits pour ce moment hors du temps. Puis, dans votre bulle, tout en étant relié·e au groupe, vous vous lancerez dans la composition de votre tableau, à partir des matières que vous aurez rapportées (magazines, papiers, mots découpés, éléments naturels…).

Un temps de clôture permettra, pour celles et ceux qui le souhaitent, de mettre en mots ce qui a émergé. Et nous prolongerons les échanges autour d'un apéritif.

Qui est Flora Clodic-Tanguy ?

Flora Clodic-Tanguy est consultante en stratégie, à la croisée de la communication, de la mobilisation citoyenne et du financement participatif. Elle a récemment accompagné les campagnes d'Epop&, Géoconscience, SATOR, Wild Legal et Born In PPM. Le tableau de vision est un kif qu'elle s'offre régulièrement pour clarifier ses envies et ses décisions.

En partenariat avec E2C Nantes Saint-Nazaire, organisme de formation dédié aux jeunes les plus éloigné·e·s de l'emploi, âgé·e·s de 16 à 30 ans, sans diplôme ni qualification ou titulaires du CAP, du BEP ou du Bac . L'objectif de l'E2C Nantes Saint-Nazaire est d'accompagner ces jeunes vers une insertion sociale, citoyenne et professionnelle durable en répondant aux enjeux du territoire et des entreprises locales.
Début de l'événement 13.05.2025 - 18:00
Fin de l'événement 13.05.2025 - 20:30

nant.png

Transition énergétique : enjeux de gouvernance et nouvelles formes de vulnérabilité, appel à textes

8 mai 2025 à 09:07

La transition énergétique s'est imposée dans tous les discours (Fressoz, 2024), passant d'un « vocable militant, élément de rhétorique politique et concept académique » (Aykut et Evrard, 2017), pour traduire aujourd'hui le double consensus d'une transformation des systèmes énergétiques (Conte et Pottier, 2023 ; Ademe, 2019 ; Geels, 2004 ; Akrich, 1989) et d'une sortie de la dépendance aux énergies fossiles.

La transition ambitionne d'une part de réduire les consommations d'énergie (objectifs d'efficacité et de sobriété) et d'autre part, de développer massivement des énergies renouvelables. Cette transition a donc vocation à favoriser la résilience, l'attractivité et l'autonomie des territoires via une valorisation des ressources disponibles localement (Ademe, 2021). Les Contrats de Relance et de Transition Écologique de 2021 placent d'ailleurs l'échelon local (communal ou intercommunal) au cœur du dispositif pour assurer leur déploiement. Autrement dit, la transition énergétique constituerait la voie vers la durabilité et vers une économie décarbonée.

Pourtant si les débats lors de la taxonomie européenne illustrent la « climatisation du monde » (Aykut et Evrard, 2017 ; Aykut et Dahan, 2014 ; Chateauraynaud, 2011), ils ont également montré que les discours de légitimation ne sont pas sans heurts (Hourcade et Van Neste, 2019) : entre énergies renouvelables et énergies décarbonées. En effet, les trajectoires des pays relèvent de logiques différentes, en cohérence avec l'accord de Paris sur le climat (2015) qui laisse à chaque pays, la liberté de définir sa propre stratégie de décarbonation.

Pour atteindre ses objectifs climatiques, la France a choisi de décarboner son mix énergétique (loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables) en substituant des sources fossiles par des sources d'énergie bas carbone (bois-énergie, éolien, géothermie, hydroélectricité, hydrogène, méthanisation, récupération de la chaleur fatale, solaire).

Dans une tradition schumpétérienne et selon une dynamique de destruction créatrice, l'innovation ayant vocation à proposer des solutions technoscientifiques est mise au cœur de la transition (Carrausse, 2024 ; Cugurullu et al., 2024). L'innovation se trouve également dans de nouvelles gouvernances décentralisées (Chantepie, 2020 ; Balaye, 2019 ; Dobigny, 2012 ; Rifkin, 2011) avec notamment la création de communautés énergétiques (Pappa Lardo, 2021 ; Balivet, 2019 ; Brummer 2018) avec des dispositifs d'empouvoirement (empowerment) des riverains souhaités plus redistributifs ou inclusifs. En effet, certaines coopérations locales font apparaître des territoires énergétiques (Fontaine, 2021 ; Aubert, 2020 ; Fontaine, 2019 ; Lopez et Alii, 2019 ; Tabourdeau et Debizet, 2017 ; Debizet, 2013) à l'échelle d'une ville, d'un quartier ou d'un bâtiment (Wokuri, 2019 ; Wirth, 2014 ; Souami, 2009 ; Walter et Devine-Wright, 2008) souvent à la recherche d'une autonomie énergétique locale. A contrario, d'autres sources (comme l'hydrogène par électrolyse de l'eau ou l'éolien offshore) nécessitent des investissements élevés avec une gouvernance centralisée.

Ce numéro spécial ambitionne d'explorer les intermédiations énergétiques à l'œuvre, ses modèles organisationnels et les réseaux d'acteurs qui se mettent en place. La diversification énergétique peut conduire à développer des formes de biogaz ou l'agrivoltaïsme (Ademe, 2021) conduisant à de nouvelles dépendances (vocation de l'agriculture, artificialisation des sols et risque de spéculation foncière par exemple).

Présentée comme une nouvelle modernité (Velly et Jarrige, 2023 ; Ademe, 2021 ; Compagnon et Saint-Martin, 2019 ; Ademe, 2017 ; Joly, 2013), cette diversification se voit pourtant remise en cause par l'augmentation d'actions en justice visant à en contester la légitimité. Réfléchir à la transition énergétique, c'est donc aussi préciser les conditions d'implantation des installations photovoltaïques sur des terrains agricoles, forestiers, naturels ou sur d'anciennes friches industrielles.

Cet appel à communications recherche des analyses portant sur différentes expérimentations et sur leur capacité à concilier d'une part, les enjeux économiques et de sécurité d'approvisionnement et d'autre part, les objectifs de souveraineté énergétique. La question de l'acceptabilité sociale de l'implantation d'énergies renouvelables (Batel, 2018) requestionne les objectifs de décarbonation fixés par la Programmation pluriannuelle de l'énergie à la fois dans leurs modalités de mise en œuvre (résistances) et dans les controverses (Arnauld de Sartre et Chailleux, 2021) qu'elles font émerger en raison notamment des activités extractives de métaux rares, des infrastructures jugées disgracieuses dans le paysage (Argenti et Knight, 2015) ou encore de l'apparition de conflits d'usage du foncier agricole (Evrard et Pasquier, 2018 ; Baggioni, 2014). Les contributions à ce numéro permettront de mettre en lumière les conditions de réalisation ou, à l'inverse, de la persistance de freins et/ou de controverses, les enjeux et les tensions qui découlent du développement de ce type de projets.

La transition énergétique fait également apparaître de nouvelles formes de vulnérabilité. La première forme se réfère à la fois aux inégalités territoriales et aux inégalités d'accès à l'énergie (Cointe, 2016) attachées, notamment, aux caractéristiques socio-démographiques et aux habitudes de consommation des individus. Elles concernent autant le logement que la mobilité.

Les récentes actions des pouvoirs publics étaient censées agir sur cette vulnérabilité énergétique à l'instar du Chèque Énergie, du Fonds de Solidarité pour le Logement, du Prêt Travaux d'amélioration de la performance énergétique d'Action Logement, et cetera. En l'espèce, la Programmation Pluriannuelle de l'Énergie pose comme objectif d'augmenter le nombre de véhicules électriques et hybrides rechargeables, soulevant la question de la capacité des ménages et des territoires à engager ce type d'investissement et à assurer le service de rechargement. La seconde forme de dépendance est autant géopolitique qu'écologique dans la mesure où les technologies énergétiques dépendent majoritairement des sources fossiles épuisables (métaux rares, lithium) et de fait, supposent de réaliser des activités extractives polluantes et consommatrices de ressources naturelles.

Aussi, ce numéro spécial ambitionne également de préciser les enjeux liés à l'émergence de ces nouvelles formes de vulnérabilité et leur propension à accentuer les inégalités. Pourtant, si le septième des Objectifs de Développement Durable (2015) en France vise à « garantir l'accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable », paradoxalement, ce droit d'accès peut conduire à un effet rebond, augmentant la demande globale en énergie pouvant entrer en contradiction avec des objectifs de sobriété énergétique. C'est pourquoi les contributions attendues sont amenées à décrire les défis que soulève une transition énergétique juste.

De fait, la transition énergétique porte en elle des disruptions organisationnelles, sociales et individuelles qu'il convient de mettre en évidence. Cet appel à communications entend donc explorer la réception sociale de la transition énergétique (Baggioni et al., 2019 ; Béhar et al., 2014 ; Wolsink, 2000), ainsi que la perception de l'évolution des usages et de son modèle de déploiement (Baggioni et Cacciari, 2019).

Ce numéro spécial souhaite en outre illustrer la pluralité des travaux en sciences sociales (droit, économie, géographie, sociologie, urbanisme), voire en sciences de l'ingénieur qui rendent compte des réalités sur les territoires afin de mieux comprendre l'appropriation de la transition énergétique dans un contexte de pluralité des gouvernances. Les contributions décriront les discours, les promesses ou des dynamiques de transition énergétique, qu'il s'agisse de programmes de substitution entre sources d'énergie ou de diversification des sources d'approvisionnement ou de création de territoires énergétiques (Perrin et Bouisset, 2022 ; Ramirez-Cobo et al., 2021 ; Rumpala, 2013) ou encore de nouvelles formes urbaines à l'instar de la smart city (Languillon-Aussel, 2024 ; Courmont et Le Galès, 2019 ; Douay, 2018).

La publication se fera dans un numéro hors-série de la revue scientifique en libre accès VertigO, première revue scientifique en importance dans la francophonie.

Échéancier

15 octobre 2025 : date limite pour l'envoi d'un texte complet respectant les conditions éditoriales précisées sur le site de la revue à l'adresse suivante : http://vertigo.revues.org

15 décembre 2025 : avis aux auteurs-es quant à l'acceptation ou au refus de leur proposition réponse définitive de la revue avec grille d'évaluation des évaluateurs

Avril 2026 : réception des textes révisés

Mai 2026 : mise en ligne du numéro

Coordination du numéro

Valentine Erné-Heintz, Université Le-Havre Normandie, UMR 6266 IDEES – Identité et Différenciation de l'Espace, de l'Environnement et des Sociétés

Soumission des propositions

Les propositions et manuscrits (avec résumé, texte complet, figures, tables et bibliographie) doivent être soumis par courrier électronique au rédacteur de la revue [Vertigo] à l'adresse suivante : redacteur.adjoint@vertigo.org

La soumission doit être identifiée au nom du dossier : Transition énergétique : enjeux de gouvernance et nouvelles formes de vulnérabilité. Pour soumettre un texte, les contributions devront respecter les normes de publication de la revue disponibles à l'adresse suivante : http://vertigo.revues.org

Lors de la soumission, les auteurs-es devront fournir les noms et coordonnées de trois réviseurs potentiels pour leur article. L'équipe éditoriale se réserve le droit de choisir ou non les réviseurs proposés.

Bibliographie

Ademe, 2019, Systèmes énergétiques territorialisés : interactions multivecteurs, feuille de route stratégique, Ademe.

Ademe, 2021, Transition 2050 – Choisir maintenant, agir pour le climat, Ademe, Collection Horizon, Rapport, 687 p.

Ademe, 2017, Agriculture et énergies renouvelables : état de l'art et opportunités pour les exploitations agricoles, Ademe.

Ademe, 2021, Caractériser les projets photovoltaïques sur terrains agricoles et l'agrivoltaïsme – État de l'art bibliographique, Ademe.

Argenti, N., Knight D. M., 2015, Sun, wind, and the rebirth of extractive economies : renewable energy investment and metanarratives of crisis in Greece, Journal of the Royal Anthropological Institute, 21, 4, pp. 781-802.

Akrich, M, 1989, La construction d'un système sociotechnique. Esquisse pour une anthropologie des techniques, Anthropologie et Sociétés, 13, 2,‎ [En ligne] URL : https://www.anthropologie-societes.ant.ulaval.ca/articles/la-construction-dun-systeme-socio-technique-esquisse-pour-une-anthropologie-des-techniques

Arnauld De Sartre, X., Chailleux S., 2021, L'incomplète mise en politique du sous-sol français, Natures Sciences Sociétés, 29, [En ligne] URL : https://www.nss-journal.org/articles/nss/full_html/2021/03/nss210048/nss210048.html

Aubert, F., 2020, « Communautés énergétiques » et fabrique urbaine ordinaire : analyses croisées Allemagne, France, Royaume-Uni, Thèse de doctorat en aménagement de l'espace et urbanisme, sous la direction de Taoufik Souami et Xavier Bonnaud, École des Ponts ParisTech, Université de Paris-Est, 547 p.

Auvet, B., Chailleux S., et Desvallées L., 2024, La modernité écologique à l'épreuve des héritages des modernités précédentes : oppositions conservatrices à des projets de transition énergétique, Développement durable et territoires, 15, 3, [En ligne] URL : http://journals.openedition.org/developpementdurable/24988

Auvet, B., Xavier Arnauld de Sartre X., Desvallées L., et Chailleux S., 2024, La modernisation écologique en action : les promesses à l'aune de leurs contradictions internes, Développement durable et territoires, 15, 3, [En ligne] URL : http://journals.openedition.org/developpementdurable/25044

Aykut, S., Dahan A., 2014, Gouverner le climat ? 20 ans de négociations internationales, Les Presses de Sciences Po, Paris, 752 p.

Aykut, S. C., Evrard A., 2017, Une transition pour que rien ne change ? Changement institutionnel et dépendance au sentier dans les "transitions énergétiques" en Allemagne et en France, Revue internationale de politique comparée, 24, 1, pp. 17-49.

Baggioni, V., Burger C., Cacciari J., et Mangold M., 2019, Repenser la transition énergétique : un défi pour les sciences humaines et sociales, Presses universitaires de Rennes, Rennes, 308 p.

Baggioni, V., 2014, Éviter la conflictualité des opérations d'aménagement : un savoir-faire des équipes-projets ? Étude comparative de deux parcs solaires, Participations, 10, 3, pp. 121-150.

Baggioni, V., Cacciari J., 2019, La fabrication de l'“acceptabilité sociale” des parcs photovoltaïques au sol, Espaces et sociétés, 178, 3, pp. 137-156.

Balaye, F., 2019, La construction territoriale de la gouvernance des réseaux de distribution d'électricité : le cas des Métropoles de Brest et Grenoble, Thèse de doctorat en aménagement de l'espace et urbanisme, sous la direction de Bernard Pecqueur et Gilles Debizet, Université Grenoble Alpes.

Balivet, B., 2019, Le changement climatique et l'immeuble, dans M. Hautereau-Boutonnet, S. Porchy-Simon (dir.), Le changement climatique, quel rôle pour le droit privé ?, Dalloz, 259 p.

Batel, S., 2018, A critical discussion of research on the social acceptance of renewable energy generation and associated infrastructures and an agenda for the future, Journal of Environmental Policy & Planning, 20, 3, pp. 356-369.

Brummer, V., 2018, Community energy – benefits and barriers : A comparative literature review of Community Energy in the UK, Germany and the USA, the benefits it provides for society and the barriers it faces, Renewable and Sustainable Energy Reviews, 94, pp. 187-196.

Carrausse, R., 2024, À l'ombre des panneaux solaires, l'agrivoltaïsme. Retour sur une trajectoire sociotechnique de légitimation, Développement durable et territoires, 15, 3, [En ligne] URL : https://journals.openedition.org/developpementdurable/24653

Chantepie, G., 2020, La transition énergétique dans les copropriétés, Actualité juridique Droit immobilier (AJDI), 84 p.

Chateauraynaud, F., 2011, Sociologie argumentative et dynamique des controverses : l'exemple de l'argument climatique dans la relance de l'énergie nucléaire en Europe, A contrario, 16, 2, pp. 131-150.

Compagnon, D., Saint-Martin A., 2019, La technique : promesse, mirage et fatalité, Socio, 12, pp. 7-25.

Cointe, B., 2016, Le tarif d'achat photovoltaïque comme outil d'innovation territoriale : l'exemple des Fermes de Figeac, VertigO – la revue électronique en sciences de l'environnement, 16, 1, [En ligne], URL : https://journals.openedition.org/vertigo/17040

Conte, B., Pottier A., 2023, Understanding why degrowth is absent from mitigation scenarios, Revue de la régulation, 35, [En ligne] URL : https://journals.openedition.org/regulation/23034

Courmont, A., Le Galès P., 2019, Gouverner la ville numérique, Presses Universitaires de France, Paris, 120 p.

Cugurullu, F., Caprotti F., Cook M., Karvonen A., McGuirk P., Marvin S., 2024, The rise of AIurbanism in post-smart cities : A critical commentary on urban artificial intelligence, UrbanStudies, 61, 6, pp. 1168-1182.

Dobigny, L, 2012, Produire et échanger localement son énergie. Dynamiques et solidarités à l'œuvre dans les communes rurales, dans Papy F. (dir.), Nouveaux rapports à la nature dans les campagnes, Éditions Quæ, Versailles, pp. 139-152.

Douay, N., 2018, La Smart City comme nouvelle narration des politiques urbaines hongkongaises : le cas du projet urbain de Kowloon East, Flux, 114, pp. 22-37.

Evrard, A., Pasquier R., 2018, Territorialiser la politique de l'éolien maritime en France : entre injonctions étatiques et logiques d'appropriation, Gouvernement et action publique, 4, 4, [En ligne] URL : https://shs.cairn.info/revue-gouvernement-et-action-publique-2018-4-page-63?lang=fr

Fontaine, A., 2019, L'essor des coopératives énergétiques citoyennes, Multitudes, 2019/4, 77, pp. 88-93.

Fontaine, A., 2021, Expérimenter une transition énergétique coopérative : épreuves et innovations territoriales collectives autour d'un projet de centrale photovoltaïque villageoise (Rhône-Alpes, France), Natures Sciences Sociétés, 29, pp. 36-45.

Fressoz, J.-B., 2024, Sans Transition. Une nouvelle histoire de l'énergie, Seuil, Paris, 416 p.

Geels, F. W., 2004, From Sectoral Systems of Innovation to Socio-Technical Systems : Insights about Dynamics and Change from Sociology and Institutional Theory, Research Policy, 33, 6–7, pp. 897–920.

Hourcade, R., Van Neste S., 2019, Où mènent les transitions ? Action publique et engagements face à la crise climatique, Lien social et Politiques, 82, pp. 4-26.

Joly, P.-B., 2013, À propos de l'Économie des promesses technoscientifiques, dans J. Lesourne et D. Randet (dir.), La Recherche et l'Innovation en France, Odile Jacob, pp. 231-255.

Khan, S., Taraporevala P., et Zerah M.-H., 2018, Les villes intelligentes indiennes : défis communs et diversification des trajectoires, Flux, 114, pp. 86-99.

Languillon-Aussel, R., 2024, Après la smart city ? Nouveaux enjeux urbains et nouvelles générations d'expérimentations, d'acteurs et de technologies en Europe et en Asie, Netcom, 38, 3/4, [En ligne] URL : https://journals.openedition.org/netcom/9447

Pappa Lardo, M., 2021, La gouvernance des communautés énergétiques, entre pratiques de l'espace et dynamiques de pouvoir, Espaces et sociétés, 1, 182, pp. 55-71.

Perrin, J.A, Bouisset C., 2022, Emerging local public action in renewable energy production. Discussion of the territorial dimension of the energy transition based on the cases of four intermunicipal cooperation entities in France, Energy Policy, 168, pp. 113-143.

Ramirez-Cobo, I., Tribout S., et Debizet G., 2021, Territoires d'énergie, territoires à projet. Articulations et dépendances entre conceptions urbaine et énergétique, Espaces et sociétés, 182, pp. 73-91.

Rifkin, J., 2011, La troisième révolution industrielle. Comment le pouvoir latéral va transformer l'énergie, l'économie et le monde, Les liens qui libèrent, Paris, 413 p.

Rumpala, Y., 2013, Formes alternatives de production énergétique et reconfigurations politiques. La sociologie des énergies alternatives comme étude des potentialités de réorganisation du collectif, Flux, 2, 92, pp. 47-61.

Souami, T., 2009, Conceptions et représentations du territoire énergétique dans les quartiers durables, Flux, 76-77, 2, pp. 71-81.

Tabourdeau, A., Debizet G., 2017, Concilier ressources in situ et grands réseaux : une lecture des proximités par la notion de nœud socio-énergétique, Flux, 109-110, 3, pp. 87-101.

Velly, R. L., Jarrige F., 2023, Le développement du photovoltaïque sur des terres agricoles, entre régulations publiques et jeux d'acteurs, VertigO – la revue électronique en sciences de l'environnement, 23, 2, [En ligne] URL : https://journals.openedition.org/vertigo/40813

Wirth, S., 2014, Communities matter : Institutional preconditions for community renewable energy, Energy Policy, 70, pp. 236–246.

Wokuri, P., 2019, Participation citoyenne et régimes de politiques publiques : nouvelle donne ou donne inchangée ? Le cas des projets coopératifs d'énergie renouvelable au Danemark et en France, Lien social et Politiques, 82, pp. 158-180.

Wolsink, M., 2000, Wind power and the NIMBY-myth : institutional capacity and the limited significance of public support, Renewable Energy, 21, 1, pp. 49-64.

❌