Après son one-man show Ecroué de Rire, l’ancien cambrioleur de banque spécialisé dans la neutralisation des alarmes David Desclos nous offre aujourd’hui son nouveau spectacle Hold up qui mélange humour, messages, rap et danse. Entretien avec l’ancien taulard devenu metteur en scène et acteur.

Ce spectacle, Hold up, est inspiré de ton one-man show Écroué de Rire ?
Tout à fait. Dans Écroué de Rire j’étais seul sur scène. Là, il y a un spectacle avec des danseurs, des rappeurs. J’en ai fait un spectacle musical. Écroué de Rire était adapté de mon livre David Desclos, une histoire vraie mais j’y avais mis aussi d’autres choses qui n’étaient pas dans celui-ci. Les gens veulent aujourd’hui que cela devienne une saga.
Tu avais écrit Écroué de Rire avec Stomy Bugsy. Tu as une nouvelle fois écrit ce nouveau spectacle avec lui.
Il avait peaufiné l’écriture d’Écroué de Rire avec moi et l’avais mis en scène. Le ministère de la Justice et l’éducation nationale ont acheté le spectacle. Nous avons joué dans toutes les prisons de France. On tourne d’ailleurs encore avec le spectacle dans les écoles et dans les prisons.
Tu L’avais écriten prison ?
Oui. La lecture m’a beaucoup aidé là-bas. Au début je ne lisais que des livres de gangsters puis j’ai lu plein de classiques. Je dévorais les livres. Puis je me suis à l’écriture. Je n’étais pas bon à l’école et je n’aurais pas imaginé écrire un jour. »
Le message est important. Est-ce celui de la possibilité de se réinsérer après avoir été en prison ?
Il faut désacraliser cette dernière. J’ai écrit ces spectacles pour faire passer des messages. Il y a notamment celui de suivre le droit chemin. J’avais envie de faire passer ces messages à travers l’humour. J’ai envie d’être comme un tendeur de perches pour les jeunes. Quand j’ai eu l’idée de ces spectacles j’étais utopiste. Je me suis rendu compte ensuite que je n’étais pas dans la bonne période. Nous sommes dans un moment de répression. Il y a eu des périodes où on était pour la réinsertion. Aujourd’hui on est dans une phase très dure. Il faut lutter pour la prévention.
Souvent on glorifie la prison ou au contraire il y a cette mentalité « bien fait pour eux ».
Tout à fait. Et les deux ne font que des malheureux. Quand tu vas en prison à 20 ans tu es mort psychologiquement et socialement.
Ton travail est en fait celui d’un éducateur ?
C’est ce que Stomy me dit. Les gens trouvent que ce spectacle est d’utilité sociale et publique. Aujourd’hui on est dans un discours de réouverture des prisons donc malheureusement mon message a du mal à passer. C’est comme ça depuis des siècles. Un vieux bagnard m’a dit un jour « À qui profite le crime ? » Dans les QHS, les prisonniers bossaient comme des malades pour une paie minable. Aujourd’hui on parle de prisons privées.
C’est pour cela que les gros médias t’invitent peu ?
Je pense. Si on m’avait revu en train de faire un braquage à la sortie d’une banque là on parlerait de moi.
Malgré tout tu as quand même eu un livre publié par une grosse maison d’édition : Flammarion.
Oui parce que j’ai fait une belle rencontre. Il y a eu des gros médias qui voulaient parler de moi. On avait fait un événement à la maison d’arrêt de Fresnes : théâtre, spectacle. Il y avait à la fin des choses ludique avec des kartings, une piscine. C’est la seule chose que BFM a retenu. La chaine m’appelle et je leur raconte tout ce qui a été fait. Je leur dis que je peux venir sur leur plateau expliquer les choses. On me dit OK puis c’est annulé au dernier moment. Ce genre de choses fait que tu rêves moins.
Il y a beaucoup de rappeurs dans ton spectacle. Est-ce parce qu’on en écoute en prison ?
Non. C’est d’abord parce que j’adore Stomy. En plus j’écoute beaucoup de rap. Il y a de supers messages dans ce genre musical. Je pense notamment à l’album L’Homicide Volontaire d’Assassin. Les rappeurs jouent leurs morceaux à l’intérieur du spectacle. Je pense que ça peut faire venir des jeunes au théâtre. L’éducation, la culture c’est important.
Il y a la vieille génération rap : Passi, Stomy et la jeune avec Uzi ou Da Uzi. Pourquoi ?
Pour que ce soit un spectacle qui accroche autant les parents que leurs enfants.
En dehors de la scène rap on trouve aussi Cali. Comment cela s’est-il fait ?
J’ai toujours kiffé Cali. Je voulais apporter quelque chose qui soit en dehors du rap.
Le 21 mai sera la première ?
On a déjà fait quelques représentations mais c’était du rodage. On l’a joué notamment au grand théâtre de Nevers. On a rebossé dessus depuis huit mois. On a intégré d’autres danseurs.
La prison a été une expérience hyper dure pour toi ?
Bien sûr. C’est surtout dur par rapport à la famille. Il y a des moments au mitard, au cachot où tu ne vois pas le temps passer. Des mecs se suicident à côté : c’est violent. Moi je ne prenais pas de cachetons, ne me droguais pas. Ca aide. Je raconte ça avec dérision mais c’est dur. Je pourrais faire pleurer dans les chaumières mais je ne me plains pas. Je m’en suis sorti mais quand je vois des gamins être condamnés à 18 mois de prison et être encore enfermés cinq ans plus tard car ils se sont fait prendre avec un portable ça m’énerve. Je me sens comme un survivant de tout cet univers.
Vous jouerez le spectacle en province ensuite ?
On a très envie. On va faire venir des investisseurs. On espère qu’ils vont croire au spectacle, à la réinsertion.
C’est un vrai bonheur j’imagine que de jouer au théâtre du Gymnase ?
C’est énorme. Jouer dans ce lieu où ont joué Coluche, Le Luron c’est génial.
Entrevue : Pierre-Arnaud JONARD
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